Réussir son expatriation, l'histoire et les conseils de Fabrice qui y a tout gagné

22/09/2018

Sous le feu de l’été, j’appelle Fabrice. Il est parti, lui. Il a assumé cette envie d’ailleurs, cet appel de ce prof qui n’avait de cesse de nous répéter « the world is a global village », cette envie d’aller au-delà d’un microcosme parisien devenu trop étroit pour lui.

Fabrice ou l'histoire d'une expatriation risquée mais réussie

Contrairement à beaucoup, il n’est pas parti à 20 ans, âge sans attache, sans job sérieux, avec pour seule responsabilité son propre bonheur. Il est parti à plus de 30 ans, marié, avec deux enfants et les responsabilités qui vont avec.
Contrairement à beaucoup, il n’a pas choisi l’Europe, le pays d’à côté, à l’accent familier, mais un pays méconnu, réputé comme l’un de ceux où l’expatriation est une expérience des plus exigeantes tant on se retrouve loin de ses références : la Corée du Sud.
Fabrice travaille dans un grand groupe français. Très tôt, et sans se demander si cela lui portera préjudice ou non, il s’ouvre à son boss de son désir d’ailleurs. Dès 2006, il a une proposition mais la refuse car le pays proposé, l'Inde, n’est pas compatible avec des contraintes familiales, et aussi parce qu’il n’a pas envie de vivre dans une société où tout est si normalisé, rendant extrêmement difficile le contact avec certaines catégories de la société. Le monde est ouvert et global, et c’est ce que son épouse et lui veulent vivre et faire vivre à leurs enfants.
Pour décrocher la proposition de ses rêves, Fabrice doit encore attendre et surtout prouver qu’il veut certes partir, mais pas pour n’importe quel poste. L’objectif est le tremplin pas le toboggan…
Cette preuve, il va se la créer en 2009 à l’occasion d’une réorganisation sur laquelle il travaille, et dont il veut être un acteur. Quelques 18 mois plus tard, il a mis en place une nouvelle organisation qui peut à nouveau grandir sans lui. En fait, il tue son poste : « la meilleure façon d’évoluer » me dit-il. Plus aguerri, il se trouve donc prêt pour de nouvelles aventures.
On lui propose alors un vrai défi : prendre la direction générale d’une entité en Corée. Il me confie les clefs dont il s’est servies et qui l'ont doucement amené jusqu'à cette proposition :
« Sans être un animal politique, il faut savoir lire les organisations. Savoir à qui parler des messages essentiels : ce qui t’anime profondément, ce qui te motive, les conditions dans lesquelles tu t’épanouis. Et pour ça, il faut être en paix avec soi-même et avec les autres, me dit-il ; prendre le temps d’écouter, de comprendre, et rester toujours honnête avec ceux qui comptent dans ta vie pro ou perso. ».

A l’entendre, et sans glisser de pub pour nos programmes, je me dis vraiment que plus on comprend ça bien et tôt, mieux on est armé pour faire de sa carrière une vraie trajectoire vers ses rêves et pas un parcours d’obstacles...

Il poursuit : « Il me semble que dans le fonds, ce qui me conduit est de créer, de développer des choses en lien avec des personnes de multiples horizons. c’est ce qui crée la vraie richesse des organisations. Si je ne construisais rien, j’aurais certainement le sentiment d’avoir raté ma vie professionnelle ».  

Ca y est, ils quittent le navire

Fabrice et sa famille débarquent en Corée en 2011. Sa femme renonce à un titre d’associée dans un cabinet de conseil pour donner vie à leur projet. Car ce projet, ils l’ont fondé à deux, avec autant de désir chez l’un que chez l’autre. C’est une clef essentielle à une expatriation réussie.

Partis pour 2 ans, ils resteront plus de 5. L’entité dont il s’occupe passe de 65 à 100 employés, développe et diversifie sa clientèle, double son Chiffres d’Affaires. « Je n’aurais pas pu avoir ce type de poste en restant en France, à cet âge » me dit-il. Il arrive à déjouer les pièges d’une société très verticale où les relations peuvent être violentes tant dominent des rapports de force basés sur l’âge, la séniorité et la hiérarchie. A seulement 37 ans, il s’en sort en étant hyper transparent et humble : « Dès le 1er jour je me suis « mis à nu », me dit-il. J’ai dit à mes direct reports : je suis le seul Français sur 65 employés. Je ne vais donc pas m’imposer à vous. Expliquez-moi au contraire qui vous êtes ». Il m’explique : « Lorsque la différence culturelle est si grande, si tu es une furie, et veux immédiatement répliquer tes modes de pensée, ta façon de travailler, si tu brusques trop les hommes et les femmes d’une organisation, cela ne marche pas. Les chemins à prendre pour atteindre un objectif sont parfois très détournés, mais toutes les rencontres faites au long de cet itinéraire sont une immense source d’enrichissement personnel. Nous devons toujours nous rappeler qu’au-delà de nos origines et de nos différences culturelles, nous sommes avant tout des êtres sociaux qui avons sans cesse besoin les uns des autres ».

Nouveau choix, nouveau départ

Presque 6 années plus tard, le risque pris quelques années plus tôt paye. Souhaitant initialement rentrer en France, Fabrice se voit demander ce qu’il veut faire. Fidèle à ses motivations et à lui-même, il répond que le chemin déjà parcouru devrait le faire évoluer vers un job où tout serait à construire, voire faire quelque chose qu’il n’a encore jamais fait : «participer à faire naître et développer une nouvelle initiative ou un nouveau business « from scratch ».
Et l’incroyable se produit : on lui propose une opportunité qui correspond en tout point à ce qu’il souhaite à… Hong Kong. Un conseil de famille plus tard, la décision est prise, et les voilà installés quelques mois plus tard dans cette ville incroyable entre mer, jungle et villes-immeubles où la densité de population est une des plus fortes au monde, mais où la Nature couvre néanmoins plus de 80% du territoire.

A HK, tout est plus simple, et en particulier la place des femmes dans la société. Son épouse envisage alors elle aussi un changement plutôt radical d’orientation, puis qu’elle enseigne désormais la méditation aux enfants. Les voilà désormais à 5 dans un environnement où le multiculturel prend toute sa dimension. Chacun vit l’esprit ouvert à l’autre, dans un profond respect des différences, laissant dès lors place à tous les possibles : « la vraie richesse vient de ce que l’on partage et met en commun, pas du renfermement de soi sur ses petits égoïsmes et ses grandes certitudes. C’est une chose de le dire ; c’en est une autre de vouloir le vivre ».
 
Les conseils de Fabrice pour réussir sa vie ailleurs :

  • Ne jamais perdre le fil de ce qui est important pour soi : « Il est très facile de se perdre, tant l’exotisme peut te pousser dans tes extrêmes » dit-il, « peut-être plus en Asie qu’ailleurs ».
  • Vouloir être ouvert aux autres : « Partir nous a permis de donner une plus grande dimension à notre volonté d’être tournés vers les autres ; nous n’aurions pas trouvé cela à Paris ».
  • Avoir un couple solide : partir rend nécessaire une profondeur et une authenticité dans la relation.
  • Rester ouvert aux opportunités et humble dans son comportement, à l’écoute de l’autre et de la culture locale.
  • S’être suffisamment interrogé sur ce que l’on veut vraiment, au-delà de l’exotisme, et être honnête avec soi-même sur ce à quoi l’on renonce.

 
Et vous, vous rêvez d’aller où ?